Au Gabon, une décision récente de l’État soulève un tollé chez les étudiants et dans l’opinion publique. Alors que le gouvernement vient d’annoncer la suppression des bourses pour les étudiants gabonais inscrits dans des universités au Canada, en France et aux États-Unis, un chiffre choc refait surface : en 2019, plus de 2,3 milliards de FCFA ont été consacrés à la scolarité des enfants de diplomates. Une somme qui illustre une gestion jugée inéquitable des ressources publiques, dans un pays où les étudiants “ordinaires” peinent à couvrir leurs besoins de base.
L’information, issue du rapport budgétaire du 3e trimestre 2019, met en évidence une répartition des priorités qui interroge. Tandis que certains établissements supérieurs ferment leurs portes faute d’électricité ou de moyens logistiques, une part conséquente du budget est allouée à un petit groupe privilégié : les enfants d’ambassadeurs, inscrits dans des écoles internationales au coût exorbitant. Ce traitement contrasté révèle un malaise structurel : deux jeunesses, deux politiques, un même État.
Le président Brice Clotaire Oligui Nguéma, lors d’une rencontre avec la diaspora gabonaise à Washington, a défendu la suppression des bourses par des raisons économiques et stratégiques : les étudiants concernés seraient, selon lui, trop coûteux pour l’État et ne reviendraient pas au pays. Une déclaration jugée brutale par les intéressés, dont beaucoup voient leurs projets d’études menacés.
Cependant, aucune politique incitative de retour ni de valorisation des compétences n’a été mise en place par les autorités, ce qui affaiblit l’argumentaire gouvernemental. Pour beaucoup, cette décision ressemble davantage à une sanction qu’à une réforme budgétaire cohérente.
En parallèle, le maintien des avantages pour les enfants de diplomates, inscrit dans les dépenses récurrentes du budget national, cristallise les frustrations. Selon des sources internes, ces dépenses sont reconduites chaque année, échappant à tout débat public. Ce déséquilibre alimente le sentiment d’une République à deux vitesses, où les efforts de la majorité sont négligés au profit d’une élite protégée.
Ce clivage crée une fracture symbolique et sociale profonde : celle d’un État qui semble tourner le dos à ses talents pour préserver une aristocratie bureaucratique. En privilégiant une minorité bien née au détriment des étudiants méritants, le Gabon prend le risque d’exclure une génération, pourtant essentielle à son avenir économique et institutionnel.







































