Au Cameroun, près de 4 000 milliards de FCFA d’emprunts extérieurs demeurent non décaissés, une situation révélée par la Caisse autonome d’amortissement (CAA) dans sa récente note de conjoncture sur la dette publique du pays. À la fin septembre 2024, le montant des Soldes engagés non décaissés (SEND’s), des fonds contractés mais non encore utilisés, s’élève à environ 3 980,1 milliards de FCFA, enregistrant une hausse de 5,2 % par rapport à l’année précédente.
Les SEND’s représentent des ressources financières provenant de différents prêts contractés auprès de créanciers internationaux. Ces financements sont prévus pour divers projets nationaux, mais des retards d’exécution empêchent leur décaissement. Selon la CAA, ces retards peuvent être causés par des cycles d’exécution prolongés, des conditions strictes des bailleurs de fonds ou encore des contraintes économiques (comme la pandémie ou les crises énergétiques).
Un autre facteur est la non-maturation des projets avant la signature des conventions de financement. Cette préparation insuffisante entraîne des retards dans l’obtention des fonds de contrepartie de l’État, ce qui bloque le décaissement effectif des fonds.
Pour pallier ce problème, le Cameroun a mis en place un nouveau mécanisme de décaissement des financements extérieurs fin 2019. Cependant, cette réforme n’a pas encore eu les effets escomptés. En septembre 2024, les SEND’s dépassaient le montant de 3 929,9 milliards de FCFA enregistré en mai 2017, malgré les efforts pour rationaliser leur utilisation.
Bien que les SEND’s soient perçus comme un obstacle, la CAA défend une vision nuancée de la situation. Selon elle, les SEND’s offrent aussi une opportunité de réévaluation des projets financés, avec la possibilité de renégocier les termes des prêts si nécessaire. Ils jouent un rôle important dans la planification budgétaire et la gestion des finances publiques. La CAA souligne que, dans un contexte de développement, les délais entre l’engagement et le décaissement des fonds sont parfois essentiels pour garantir une utilisation optimale des ressources.
Malgré cette vision pondérée, le président Paul Biya a exprimé des préoccupations concernant l’inefficacité de la gestion des SEND’s, notamment dans la circulaire de 2023 sur la préparation du budget de l’État. Il a demandé une réduction de ces financements non utilisés, incitant le gouvernement à annuler les conventions de prêts pour les projets ayant des délais d’exécution prolongés.
Les SEND’s au Cameroun illustrent un dilemme pour les autorités : d’un côté, ils représentent un potentiel de financement à exploiter pour le développement du pays, et de l’autre, leur accumulation met en lumière une gestion inefficace. Pour atteindre ses objectifs de développement, le Cameroun devra non seulement optimiser ses stratégies de décaissement, mais aussi s’assurer que les projets sont mûrs avant de contracter de nouveaux emprunts.







































